vendredi 29 octobre 2010

Mise au point sur la Vénus Hottentote

La sortie du film Vénus noire d'Abdellatif Kechiche a provoqué un regain d'affluence sur ce blog. L'article de Bruno Forestier "Pin-up du mois : la Vénus hottentote" a ainsi enregistré plus de 2000 consultations en trois jours. Malheureusement, la nature des commentaires laissés montre que la plupart des visiteurs le lisent en diagonale. En effet, est-il besoin de préciser que cet article est ironique ?
Il est donc demandé à ceux qui voudraient commenter de peser leurs mots avant de parler de "honte" ou de "racisme". 
Le lecteur vigilant notera par ailleurs que cet article fait partie de notre rubrique des Pin-up du mois qui entend donner chaque mois la courte biographie d'une femme dont la beauté a marqué l'histoire.

La rédaction

Image : affiche  annonçant l'exposition de la Vénus hottentote à Londres (source ici).
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dimanche 24 octobre 2010

Rubens, Poussin et les peintres du XVIIe : histoires d’influences

Présentée depuis le 24 septembre dans le coquet et très classique hôtel d’Henry Parent qui abrite le Musée Jacquemart-André, l’exposition « Rubens, Poussin et les peintres du XVIIe siècle » offre un éclairage intéressant sur cette période artistique. Elle permet de circuler au milieu des riches échanges entre la peinture flamande et française, tout en offrant une vision assez claire du renversement des courants artistiques de cette époque, l’art flamand cédant au cours du siècle à l’art classique français.
L’exposition se présente comme un dépassement de la fameuse querelle du coloris de la fin du Grand Siècle, opposant le baroque (où prédomine la couleur) au classique (privilégiant le dessin), pour montrer comment les deux courants s’influencèrent réciproquement. Au cœur de cette dispute (bien malgré eux puisqu’elle se déchaîne après leur mort) les deux phares de l’exposition : Poussin et Rubens.
Cependant, pour admirer les maîtres et accéder aux salles, en ce dimanche d’octobre, il faut d’abord patienter (malgré la réservation) vingt bonnes minutes. L’omniprésence des audioguides (gratuits, tout comme le vestiaire) rend la visite un peu laborieuse. On n’a pas l’habitude de voir les visiteurs s’attarder aussi longtemps devant les tableaux, d’autant que les salles sont assez exiguës. Mais le parcours, agencé chronologiquement, est assez didactique et rapproche les deux courants. La disposition des tableaux (même si l’on regrette certains éclairages trop directs) et leur association sont très parlantes.

On peut de la sorte suivre l’évolution de la prépondérance de l’école flamande au début du XVIIe siècle, principalement avec Rubens, et, grâce à la confrontation d’œuvres, constater son influence sur les peintres français. C'est ainsi que Philippe de Champaigne est mis en regard de Jacques Fouquières, ou les Frères Le Nain comparés à David II Téniers. Puis, l’on assiste à l’affirmation progressive de l’art classique français représenté  notamment par de très belles peintures de La Hyre, Le Sueur, Patel l’Ancien, Le Brun, Le Lorrain  et, bien sûr, Poussin. La visite se conclut par les artistes flamands « convertis » au classicisme comme Flemal ou Lairesse, marquant ainsi l’inversion des influences.
Il est amusant de noter que le renversement des courants artistiques et la domination de l’art classique français à la fin du XVIIe mis en avant par l’exposition vont à l’encontre du dénouement de la querelle du coloris qui vit la victoire des rubénistes et dont le principal défenseur (Roger de Piles) fut reçu en 1699 à l’Académie royale de peinture et sculpture, au poste de conseiller honoraire.
En guise d'épilogue à ce plaisant voyage à travers la peinture du XVIIe, on peut prendre un café dans le ravissant salon de thé du musée sous un plafond de Tiepolo.

GV

Images : affiche de l'exposition (source ici), L'arrivée de saint Jean de Matha et de saint Félix de Valois à Paris par Theodoor van Thulden, vers 1632 (source ici).

Voir le site, très bien fait, de l’exposition : http://www.culturespaces-minisite.com/rubens-poussin/index.html
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lundi 18 octobre 2010

Rencontre avec Michel Tournier

La retraite littéraire

Il y a quelques semaines, les Septembriseurs ont rendu visite à Michel Tournier en son presbytère de Choisel. Arrivés à quinze heures, au son des cloches, nous avons trouvé le Maître inspectant son jardin, béquille vissée dans la main droite et son célèbre bonnet sur la tête. Très accueillant, il nous a fait part de ses préoccupations botaniques avant de nous inviter à pénétrer dans sa demeure. Du presbytère, nous n’avons vu que la pièce principale, au rez-de-chaussée, plongée dans une relative obscurité. Le désordre y règne, les livres candidats au prix Goncourt s’étalant un peu partout (Tournier est membre de cette académie). Il nous a indiqué la vaste table sur laquelle il a composé et compose encore son œuvre. On y trouve, pèle mêle, des traductions de ses romans, des manuscrits, ses fameux carnets extimes, mais aussi les projets actuels rangés dans des pochettes de couleur.
Michel Tournier est aujourd’hui âgé de 85 ans. Il a derrière lui une œuvre abondante couronnée par les plus grands prix, particulièrement le mémorable Goncourt (à l’unanimité comme il aime à le rappeler) récompensant Le Roi des Aulnes, son œuvre majeure. Ses écrits se sont espacés ces derniers temps, particulièrement les romans dont le dernier, Éléazar, remonte à 1996. Mais comme Michel Déon à l’Académie française, Michel Tournier a trouvé dans son couvert de l’Académie Goncourt une nouvelle manière d’exprimer ses goûts. Depuis 1972, il y tient sa place.

En rendant visite au grand auteur, nous avons voulu l’entretenir, bien sûr, de son œuvre que nous admirons tous, mais aussi l’entendre à propos de la littérature et notamment d’auteurs que nous aimons. Hélas, nous avons été quelque peu désappointés par les réponses sans appel qu’il nous a très vite opposées : Proust ? « Il fait des phrases trop longues, trop liquides, liquoreuses ». Et Gide, ne fait-il pas, lui, des phrases plus courtes et mieux ciselées ? « Gide se raconte beaucoup trop ». Céline alors ? « Céline, ce n’est pas mal écrit, mais, je n’aime ni le ton ni les thèmes abordés ». Mais alors qui ? Il leur préfère de loin Valéry mais aussi Flaubert pour ses Trois contes. Par-dessus tout, il place Les Confessions de Rousseau. Étonnant quand l’on sait que Tournier ne porte que peu d’estime à l’intime. Mais on peut envisager la question sous l’angle de la filiation intellectuelle. Rousseau était philosophe et si Michel Tournier, on le sait, a passé deux fois l’agrégation de philosophie sans succès, il a toujours gardé un goût prononcé pour la chose philosophique, que l’on retrouve particulièrement dans Vendredi ou les limbes du Pacifique, son best-seller (dont il existe aussi une version « pour enfant », Vendredi ou la vie sauvage). D’ailleurs, quand on l’interroge sur l’origine de son désir d’écrire, il nous lit quelques notes sur la beauté, qu’il a prises en lisant Kant.

Cependant, on ne sent pas (ou peut être plus) chez Tournier de passion pour la chose littéraire (et les débats qui vont avec) ; il nous parle de l’écriture comme d’un métier dans lequel il a bien réussi.
M. Tournier, peut-être à cause de notre jeunesse, prend un ton souvent professoral, quand il ne nous raconte pas quelques anecdotes déjà relatées dans des articles parus à l’occasion de la récente publication de ses Écrits de voyages. On ne vous reparlera donc pas de Gracq (« le meilleur écrivain de sa génération »), ni de Nimier (« un monstre de précocité » avec qui il était au collège), ni de ses bonnets crochetés (pas tricotés, s'il vous plaît), ni de l’invitation d’Ingrid Bergman (chez qui tout le monde parlait anglais sauf lui), ni de son prix Nobel manqué (donné à Claude Simon)…
De ce pèlerinage nous retiendrons en revanche l’accueil chaleureux et la grande gentillesse de Michel Tournier. Très disponible pour répondre à nos questions, il s’est révélé être un homme simple en plus d’un très grand auteur. Certes, nous aurions aimé pouvoir mieux discuter littérature et création littéraire, mais ce n’est que partie remise !

GV

Ci-dessous, le lecteur trouvera quelques extraits de notre entretien avec Michel Tournier.

L’après-guerre
Michel Tournier : J’ai vécu des périodes historiques tellement dramatiques, tellement violentes… Il y a eu la Libération. C’était horrible : le pouvoir a disparu — c’était un pouvoir compromis avec les Allemands — plus de gendarmeries, plus rien, on a vu arriver des petits merdeux de voyous pour qui ne comptait qu’une chose, c’était premièrement fusiller, deuxièmement voler, troisièmement violer. Et moi je vous assure que j’ai vu des scènes avec des femmes tondues, entièrement nues, marchant dans la rue, pieds nus, sous les crachats. C’était un spectacle atroce, alors que les petits salauds qui faisaient ça, on n’en avait jamais entendu parler pendant l’Occupation avec la Résistance. La Résistance a commencé après le départ des Allemands, alors là oui, il y en avait des FFI…
Les Septembriseurs : C’est pour ça que vous avez refusé de vous engager dans l’armée ? Parce que vous en aviez l’âge...
MT : Tout le monde voulait s’engager dans l’armée, elle était débordée, on manquait de tout, d’uniformes, d’armes, d’entraînement. Alors moi je suis plutôt antimilitaire, ce n’est pas mon genre la discipline dans l’uniforme, jamais de ma vie je n’ai porté un uniforme.
LS : Vous n’avez pas fait votre service militaire ?
MT : Je ne l’ai pas fait parce que, à l’âge où j’aurais dû le faire, il n’y en avait pas, on était débordé. Il y en avait tellement ! On prenait tous les jeunes qui n’avaient pas fait leur service militaire pendant des années, pour faire la guerre d’Indochine et la guerre d’Algérie. Pas brillant. Je ne tenais pas du tout à faire la guerre d’Algérie. On manquait d’armes d’uniformes, d’entraîneurs, on ne savait pas se servir d’un fusil.
J’ai échappé de justesse à la déportation du service du travail obligatoire. On m’a fait passer une visite, c’était les Français qui organisaient le STO ; l’envoi des jeunes Français dans les usines allemandes, c’était des gens du village. On m’a fait passer une visite médicale. On m’a trouvé très bon ! J’étais parfait pour aller faire des armes en Allemagne, mais ça n’a pas eu lieu, car ce qui s’est produit c’est que les usines d’armement allemandes étaient tellement bombardées par les Américains qui venaient d’Angleterre, que finalement ils n’avaient pas besoin d’ouvriers français pour des monceaux de ruines.
Au lendemain de la guerre, j’étais germaniste et je n’avais qu’une idée, c’était de faire mes études de philosophe en Allemagne. Mais attention, on n’allait pas en Allemagne comme ça. Zone d’occupation anglaise, il n’en était pas question, il fallait être Anglais ou Américain. Pour la zone d’occupation française, il fallait un ordre de mission militaire, et pas facile à obtenir. À force de faire des démarches et de traîner par terre, j’ai eu mon ordre de mission milliaire. Alors là tout s’ouvrait ! Vous étiez engagé en quelque sorte, on vous payait votre voyage et sur place, vous aviez le droit de manger dans les mess militaires français.

Le métier de traducteur
LS : On a l’impression que votre filiation intellectuelle est plus du côté de la philosophie que de la littérature ?
MT : À l’origine c’était la philosophie. Voilà mon histoire : j’échoue deux fois à l’agrégation de philosophie et je renonce. À ce moment-là, je me tourne vers la littérature, j’avais un gagne-pain TRÈS pénible, je ne vous le conseille pas, mais ça m’a tiré d’affaire, c’était la traduction. J’ai toujours parlé allemand et mes parents étaient germanistes, pas allemands, mais germanistes, et je traduisais des masses de livres de l’allemand en français, un français traduit de la langue étrangère en français. C’est très pénible, un métier austère, solitaire, triste. Ce qu’il y a de terrible c’est que vous êtes payé à la page, vous savez ce que vous allez gagner à la fin de la journée. Quand vous faites un tour dans le jardin, vous savez ce que ça va vous coûter en argent. Alors, j’ai fait ça un certain temps. La traduction a quand même un avantage, dont j’ai profité, c’est un exercice d’écriture excellent. On vous donne un texte étranger et vous devez en faire un texte français littéraire aussi bon que possible. Le bon français n’a rien à voir avec le texte étranger qu’on vous donne. Et ça m’a beaucoup appris. J’ai traduit, je ne sais pas combien de romans, des documents historiques… C’était un excellent exercice de français, il n’y a rien de tel pour maîtriser le français que de l’opposer à une langue étrangère. Dit comme ça en anglais ou en espagnol, en français c’est une autre formule.

Le bon titre
LS : Entre savoir bien rédiger le français et écrire un roman, il y a un fossé… Il faut structurer un roman…
MT : Il faut savoir rédiger, c’est un outil de travail, un peu comme de savoir taper à la machine. Le roman, c’est autre chose. Alors selon moi, pour écrire un roman par exemple, il faut d’abord un bon titre. Je suis choqué, je reçois tous les jours – vous voyez, il y en a plein partout –, des livres envoyés par les services de presse, souvent des romans, je suis choqué par la nullité des titres. C’est la première chose que vous regardez, vous recevez un livre, vous regardez le titre.
LS : C’est quoi pour vous un bon titre ?
MT : Il faut que ça sonne, et que ça ait un rapport intime avec le livre, ce n’est pas n’importe quoi. Par exemple, un grand classique d’Allan Patton sur le problème de l’Afrique du Sud, si vous ne l’avez pas lu, je vous le recommande, le titre est merveilleux, c’est traduit de l’anglais : Pleure mon pays bien aimé. C’est le drame de l’Afrique du Sud, avec le problème de l’Apartheid.
LS : Est-ce que vous trouvez que Eugénie Grandet ou Le père Goriot sont de bons titres ?
MT : Non ! Balzac était épatant, il travaillait comme un fou mais avait besoin d’argent le plus tôt possible. Il portait ses manuscrits inachevés à son éditeur pour avoir une petite avance. Le problème de l’écrivain c’est l’avance. Réfléchissez, vous écrivez un livre, ça prend facilement cinq ans, mais même si ça prend six mois, il faut vivre pendant ces six mois. Alors qu'est-ce qui se passe ? Vous allez chez votre éditeur, vous dites voilà je commence un livre sur tel sujet, faites-moi un contrat, je vous l’apporte dans six mois. Il vous fait un contrat et un petit chèque. C’est ce qu’on appelle l’avance, et beaucoup d’écrivains vivent d’avances, et quand le livre paraît, ils sont déjà tellement endettés vis-à-vis de leur éditeur, qu’ils n’ont pas tellement à attendre de droits d’auteur. Alors question droits d’auteur, la grande solution évidemment, c’est le prix littéraire. Il est évident qu’un roman qui paraît d’un inconnu, qui n’est pas mis en valeur par un prix littéraire, si on en vend 150 exemplaires c’est le bout du monde, et l’éditeur perd de l’argent. Pour qu’un livre ne perde pas d’argent, il faut en vendre 500. Si l’éditeur en vend 500, il s’y retrouve, à condition de ne pas avoir versé d’avance. Alors avec le prix Goncourt, moi j’ai eu une veine de cocu. Je commence très tard, à quarante-deux ans avec Vendredi ou les limbes du pacifique. Vous remarquez mes titres, Le Roi des aulnes, c’est un poème de Goethe… 
LS : Justement à propos du Roi des aulnes, on vous a conseillé de donner ce titre plutôt que La phorie… 
MT : Oui, La phorie, ça ne tenait pas le coup. « Qui galope si tard dans la nuit et le vent », c’est un père portant son enfant. Le thème du Roi des aulnes, c’est l’enfant porté par le père, et, au point de vue religieux, l’enfant porté par le père c’est l’enfant Jésus porté par saint Joseph, ce qui est très rare, l’enfant Jésus étant porté par la sainte Vierge pas par saint Joseph. Et puis il y en a un autre porte-enfant, qui s’appelle porte-Christ, c’est Christophe, le porteur du Christ. C’est le thème de l’enfant porté par un homme, c'est-à-dire par le père. Je suis très content de ce titre. La Goutte d’or, c’est très bien aussi ; j’y suis allé souvent dans ce quartier arabe de Paris, pas très bien famé mais pittoresque et très vivant.

Rousseau et la Révolution
MT : Selon moi, le plus grand livre de toute la littérature – vous vous rendez compte de ce que je vais vous dire, je vous rends service si vous ne l’avez pas encore ouvert, vous allez vous y précipiter dès ce soir –, c’est Les Confessions de Rousseau. Premièrement, c’est écrit dans un français admirable. Deuxièmement, c’est écrit dans un français oral. Troisièmement, le sujet est formidable parce que c’est la veille de la Révolution, que Rousseau ne connaîtra pas, heureusement, parce que si Rousseau avait vécu, il aurait probablement été guillotiné. Ça n’aurait pas été à l’honneur de la Révolution française. 
LS : On ne peut pas dire…
MT : Oui, bien sûr, enfin ça n’a pas été la vie en rose…
LS : On ne fait pas de révolution sans révolution…
MT : C’est ça. Enfin, peut-être éviter la guillotine quand même…
LS : Mais avant c’était la roue et la pendaison sous l’Ancien Régime.
MT : Oui, il ne faut pas oublier que la guillotine était un progrès. Avant c’était ou la hache ou le bûcher. Et puis il faut dire aussi une chose qui peut excuser la Terreur c’est qu’à l’époque on tuait beaucoup. Maintenant la peine de mort a disparu, mais à l’époque, tous les jours place Notre-Dame à Paris il y avait des exécutions et les gens se précipitaient pour voir ça.
Propos recueillis par Bruno FORESTIER, Lucien JUDE, Louis L. et GV. 

Images : photo de Michel Tournier (source ici), couverture des éditions folio du Roi des Aulnes (source ici), Vendredi ou les limbes du Pacifique (source ici), Le Vent Paraclet (source ici), couverture de L'île d'espérance d'Erich Maria Remarque, traduit par Michel Tournier (source ici), Michel Tournier lors de notre entretien (LL), couverture de l'édition folio des Confessions de Rousseau (source ici).
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dimanche 10 octobre 2010

The Undertones ressuscités

Les reformations d’anciens groupes qui fleurissent depuis quelques années ne sont généralement pas notre tasse de thé. C’est souvent un triste spectacle de voir monter sur scène ces vestiges du rock, plus encore de les entendre jouer des morceaux qui firent leur gloire il y a trente ou quarante ans et paraissent aujourd’hui bien décalés avec leur sympathique mais sénile dégaine. Pourtant, comment ne pas se laisser tenter par ces noms autrefois prestigieux dont la musique continue de nous enchanter ? Déjà il n’y a pas si longtemps, nous n’avions pas regretté l’excellent concert donné par l’ancien chanteur des Seeds, Sky Saxon (mort depuis, les choses vont vite…). Hier encore donc, l’expérience fut heureuse au Trabendo, à Paris, où les Undertones faisaient leur grand retour dans la capitale.
Ce groupe irlandais de punk-rock connut une existence brève mais remarquable entre 1976 et 1983. En quelques années seulement, ses cinq membres s’affirmèrent comme l’une des meilleures formations de l’époque, aux côtés des incontournables Ramones et Clash. Avec une musique plus pop que punk, ils parvinrent à triompher dans le monde entier, livrant une impressionnante quantité de tubes, parmi lesquels I Gotta Getta, True Confessions, My Perfect Cousin, sans oublier le plus célèbre d’entre tous, Teenage Kicks.

Les choses ont un peu changé depuis 1980, en premier lieu le chanteur, Feargal Sharkey, qui n’a pas souhaité participer à la reformation du groupe en 1999. Ce dernier a été remplacé par Paul McLoone, légèrement plus jeune que les autres membres historiques bien que suffisamment vieux pour ne pas déparer. Quoi qu’on en pense, tout ce beau monde est encore ingambe, ainsi que le lecteur pourra en juger par la vidéo ci-dessous. Devant quatre à cinq cents personnes, dont quelques punks survoltés comme au bon vieux temps, les Undertones ont parfaitement rempli leur contrat, jouant avec bonheur presque tous leurs classiques, sans oublier de saluer l’anniversaire de la naissance de John Lennon en reprenant superbement Instant Karma !. Une bonne ambiance*, des artistes en grande forme, en somme, voilà bien le genre de concerts qui nous réconcilierait définitivement avec ces incessantes reformations …

Lucien JUDE



* Signalons que notre ami F., qui est de toutes les sorties, s’est tout de même fait barboter sa veste qu’il avait négligemment abandonnée sur une rambarde, estimant qu’elle n’y risquait rien. Celle-ci contenait dans une poche Sanctuaire de M. Faulkner, livre dont les 50 premières pages ont été jugées déplorables par le même F. Le voleur peut donc au moins garder le livre sans scrupule.

Images et vidéo : pochette du best of Teenage Kicks (source ici), photo du groupe actuel (source ici). Vidéo de I Gotta Getta (LJ).
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