Que reste-t-il quand il n’y a plus
rien ?
C’est bien cette question que pose La
route au spectateur qui
accompagne un père (Viggo Mortensen) et son fils (Kodi Smit-McPhee) dans un monde où rien ne subsiste. Tourné dans
des décors naturels de routes abandonnées et de mines désaffectées, le film montre un univers grisâtre, froid, en proie aux flammes. L'inconfort est réel
pour le spectateur de voir cet enfant au milieu d’un univers si hostile. Seules
comptent la survie et la lutte journalière contre la faim car le cannibalisme
fait loi et la chasse à l’homme prévaut ; il faut donc à ce couple
improbable se déplacer sans arrêt.
Vers un monde meilleur ?
Le bord de la route sera l’occasion de
rencontres dangereuses et effrayantes. On entrevoit pour nos héros la
possibilité de finir dans un garde-manger, découpés petit à petit. Résonnent alors, en flash-back, les violentes paroles de la mère déjà
suicidée (Charlize Theron) du garçonnet : "quand ils nous trouveront, ils me
violeront, violeront ton fils puis ils nous mangeront". Ainsi, le film
aborde avec acuité la question du suicide altruiste, ce qui donne lieu à de
très belles scènes.
Les autres ?
Le garçon ne connaît pas ses semblables :
il apparaît comme unique et on suppose assez vite que les autres enfants ont
déjà fini en ragoût. Né après le désastre, il n’appréhende pas le monde qui
l’entoure, il ne le connaît qu’à l’état de ruine, sans
signification, mais son père tente malgré tout d’introduire du sens : la transmission est l’un des enjeux du
film.
Vir probus ?
C’est la notion d’humanité qu’il s’agit
d’expliquer. Suffit-il de ne pas être cannibale pour être du côté des "bons" ? Car tuer ou être tué, le film pose évidement la
question, et il s’agira au-delà de la survie, de renouer avec les valeurs
d’entraide. Faire du lien, faire confiance, s'avèrent de réelles épreuves à
l’aune des temps nouveaux.
John Hillcoat nous livre un excellent
film, très émouvant et assez proche de ce que l’on imagine être la fin du
monde. D'ailleurs, c’est principalement en cela qu’il s’oppose à l’autre film
apocalyptique du moment, Le livre d’Eli, réalisé par Albert et Allen Hughes, avec Denzel Washington, un road movie, qui, lui, oscille entre
le western, Madmax
et les arts martiaux, mais qui ne place jamais le spectateur en danger tant les
sujets difficiles — pourtant souvent identiques à La route — sont soit éludés, soit tournés en
dérision. On est loin de l’émotion suscitée par La route, film encore visible dans une trentaine
de salles en France.
GV
On peut ajouter que le film est inspiré du très bon bouquin de Cormac McCarthy prix Pulitzer 2007..
RépondreSupprimerC'est un très bon film, on peut le voir à l'Ugc Orient express (Paris) où les vibrations du métro renforcent bien le sentiment du monde qui s'écroule devant nos yeux.
RépondreSupprimerUne partie des scènes où l'on voit des usines en ruine et autres terrains dévastés a été tournée dans la région de Detroit, ravagée par la désindustrialisation des années 80, c'est un monde pas si éloigné du notre finalement...
Un beau morceau de publicité dans ce film avec la scène qui voit le père découvrir une canette de coca ! Il l'offre à son fils comme si c'était le Graal. Vu que la scène est bien longue, je me demande combien Coca a investi dans cette exceptionnelle page publicitaire…
RépondreSupprimerÀ part ça, très bon film. La scène de la maison cannibale en particulier…
Il est vrai que le film prend parfois des allures de panégyrique de la boite de conserve.
RépondreSupprimerOn y retrouve aussi la célèbre marque Spam.