Au cœur du 16e
arrondissement, dans l’ancien village de Passy, « la maison de
Balzac » apparaît comme une enclave au milieu d’une rue typiquement
haussmannienne. Bâtie à flanc de colline (permettant un double accès qui fut
bien utile du temps de son illustre locataire, toujours poursuivi par ses
créanciers), elle est bordée d’un petit jardin sympathique quoique fort mal
entretenu.
Cette demeure dans laquelle
Honoré de Balzac habita entre 1840 et 1847 a été transformée en musée par la
ville de Paris. L’entrée est gratuite, comme c’est le cas pour tous les musées
de la ville, et nous oserons dire que c’est justice eu égard à son faible
contenu.
On est en effet étonné par la
pauvreté des objets exposés : quelques tableaux et gravures représentant
amis et parents, une demi-douzaine de souvenirs personnels comme une belle
« canne aux turquoises », des manuscrits de La vieille fille montrant l’immense travail de correction et puis
c’est à peu près tout. Il faut reconnaître que l’exiguïté des lieux interdit
toute débauche, mais cette contrainte n’explique pas tout. Ainsi, le cabinet de
travail de Balzac, saint des saints de la maison, semble d’un dépouillement
excessif si l’on songe au bric-à-brac qu’il fut à l’époque. Certes, on peut
voir le bureau sur lequel il écrivit nombre de ses chef-d’œuvres (Une
ténébreuse affaire, Splendeurs et
misères des courtisanes, La
cousine Bette…) ainsi que son buste qui
autrefois trônait déjà modestement à cette place. Toutefois, que penser de
cette bibliothèque presque vide ? De ce crucifix comme unique décor ?
Pour un peu, on se croirait plus certainement dans une cellule de moine que
dans l’antre du grand écrivain.
Une salle mérite pourtant le
détour : elle présente sur trois murs une longue généalogie des principaux
personnages de la Comédie humaine
accompagnée de plusieurs centaines de gravures de Charles Huard. On peut
retrouver aux côtés des célèbres Rastignac, Rubempré ou Chabert les figures de Montriveau, Ferragus, Gaudissart
et même quelques personnages historiques qui apparaissent dans l’œuvre de
Balzac (Jésus, Catherine de Médicis, Robespierre…).
Alors cette visite vaut-elle le
déplacement ? La suite de tableaux de Pierre Alechinsky censée illustrer des
extraits du Traité des excitants modernes
et exposée dans les salles du bas nous inciterait à répondre catégoriquement
que non. Ajoutons que l’excessive proportion de gardiens dans ces lieux étroits
n’est rien moins qu’exaspérante : cinq personnes sont employées par la
mairie ! Assises sur leurs chaises de fonction, elles passent le plus
clair de leur temps à braquer des yeux inquisiteurs sur les malheureux et,
avouons-le, rares visiteurs. Cette population contribue pour beaucoup au
désagrément de la visite et nous inciterait à la déconseiller vivement. Néanmoins,
la maison en elle-même reste une destination intéressante pour les lecteurs de
Balzac (auxquels nous recommandons surtout la visite de sa maison de Saché, vrai musée pour le coup). Les plus passionnés n'apprendront rien mais y feront un pèlerinage, les autres seront peut-être tentés d'en savoir plus. Bien préservée avec sa cour et son petit jardin, c’est aussi une étape
agréable pour les promeneurs non balzaciens. Comme le disait lui-même
l’écrivain dans une lettre à Mme Hanska (1840) qui résume assez bien les
lieux et leur donne une dimension historique : « Je tiens à une maison calme, entre cour et jardin, car c’est le
nid, la coque, l’enveloppe de ma vie ».
Lucien JUDE
Maison de Balzac : 47 rue Raynouard, 75016 Paris.
Images : bureau de Balzac (source ici ), vue du jardin (photo LJ).
Ne pas oublier que la maison Balzac est réputée aussi pour sa bibliothèque !
RépondreSupprimerLa dernière maison de Balzac (il en était le propriétaire) a, hélas, été démolie, elle se situait rue Fortunée, et proposait le petit musée personnel du "forçat littéraire ".
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