mercredi 26 mai 2010

Lecture pour la jeunesse (d'autrefois)

A l'heure où le Conseil représentatif des associations noires (CRAN) réclame en justice l'insertion d'un avertissement dans Tintin au Congo afin d'en combattre le caractère raciste, il nous paraît opportun de reproduire ici quelques sympathiques illustrations tirées du roman d'aventures Le chasseur de fauves (1928-1930) du trop oublié Arnould Galopin. Pour en faciliter la compréhension, nous nous sommes permis d'y ajouter quelques extraits choisis qui ne manqueront pas non plus de charmer le lecteur. "Toute une époque" comme le disait si justement Raoul Volfoni.

"Moi content, Gao est vengé."

"L'officier se tourna vers le second captif :
— Et toi, comment t'appelles-tu ?
— Djelma Relizane.
— Tu habites aussi Yannaour ?
— Non, je suis commerçant à Calcutta.
— Tu es marié ?
— Oui, et j'ai trois enfants.
— Trois enfants ? Et tu risques stupidement la mort au lieu de veiller au bonheur de ta progéniture ? C'est insensé.
Djelma Relizane baissa la tête.
— Songe à tes enfants, poursuivit le lieutenant, songe que tu peux leur conserver un père en me disant qui est le grand maître des Fils de l'Indus."

"Fredo monta dans le véhicule"

"Bomako se mit à danser"

"— Massa Johnson !… Massa Johnson !…
L'Américain, entendant cet appel, dressa l'oreille et s'arrêta net.
— Qui crie ainsi ? demanda Kwang.
— On dirait qu'on a prononcé mon nom !
— Vous croyez sahib ?
Les appels recommencèrent.
— Massa Johnson !… Massa Johnson !…
Le metteur en scène eut un haut-le-corps :
— Cette fois, plus de doute… C'est bien mon nom qu'on appelle !
Il se retourna et aperçut le noir qui courait dans les hautes herbes à cinquante mètres environ en arrière de la caravane.
— Oh ! s'exclama-t-il joyeusement, c'est Bomako… C'est ce brave Bomako… Mes amis sont par ici… Je suis sauvé !…
Tournant bride, il galopa dans la direction du Soudanais et stoppa à trois mètres de lui.
Il sauta de cheval et se jeta dans les bras du nègre qui pleurait de joie : 
— Massa Johnson, massa Johnson… Moi bien content de vous revoir…
— Et moi donc, Bomako ? Quelle joie, si tu savais…"

"Cette nuit-là une attraction, inédite pour eux, était inscrite au programme : la danse du Tchik-Tchok.
À un moment donné, en effet, les musiciens se mirent à marteler leurs tams-tams avec ensemble, faisant un vacarme formidable et assourdissant.
Tout à coup, la foule s'écarta pour livrer passage à un être fantasque, sorte de boule emplumée surmontée d'un appendice élevé et pointu qui gambadait frénétiquement sur deux jambes humaines.
C'était le Tchik-Tchok, monstre imaginaire symbolisé en l'occurrence par un des griots de la tribu, savamment travesti. […]
C'était impressionnant et Bomako, à vrai dire, n'était qu'à demi rassuré devant cet être surnaturel. Pour se préserver des maléfices, le Soudanais serrait fiévreusement son grigri dans la main. Bohang-Tang, plus familiarisé avec ce genre de cérémonies, ne bronchait pas. Frédo, nullement intimidé, avait une folle envie de rire aux éclats."

Images et textes tirés de Le chasseur de fauves, récit d'aventures exotiques par Arnaud Galopin, Albin Michel, 1928-1930. Remerciements à F. pour cette trouvaille passionnante.
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5 commentaires:

  1. Très sympathique!
    J'ignorais tout de cet Arnould Galopin.
    Les illustrations sont pleines de charme, bien que certains y trouveraient à redire (attention au piège des jugements anachroniques). Pour ma part, j'aime.
    Amusant, on pourrait presque confondre la deuxième illustration avec Olrik s'adressant à l'un de ses affidés.
    Je vais essayer de me procurer l'une de ces aventures illustrées!

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  2. C'est vrai qu'il y a du Olrik dans ce personnage ! Mais c'est pourtant un héros qui, en l'occurrence, interroge un prisonnier.
    J'apprécie tout particulièrement le Tchik-Tchok que seul Frédo (le blanc, celui qui est transporté en pousse-pousse un peu plus haut) regarde en riant !

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  3. Galopin portait bien son nom.

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  4. C'est marrant cette illustration de ce qu'on donnait à lire aux enfants alors que la polémique fait rage autour de Dora l'exploratrice qui serait peut être mexicaine et sans papiers.
    On ne peut plus faire confiance à personne.

    Alors Walt Disney ou Miyazaki ?

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  5. Ce sont plutôt des illustrations pour des livres d'adolescents. Mais les enfants avaient aussi leur part dans des ouvrages comme "Le tour de France par deux enfants" qui dresse notamment un mémorable "portrait des races"…

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